Je crois qu’il n’y a rien de plus frustrant pour une société que de devoir reverser la TVA à l’État sur une facture qu’un client n’a jamais réglé. Dans ce cas de figure, c’est l’entreprise qui supporte la somme qu’elle n’a même pas encore perçue. Et pourtant, c’est la norme dans de nombreux cas. Heureusement, le droit fiscal autorise dans certaines conditions à entamer une procédure de récupération de la TVA, sur les créances impayées. Mais encore faut-il savoir quand, comment et surtout avec quels justificatifs procéder ? Parce que si vous vous y prenez mal ou si vous commettez une erreur, c’est la trésorerie qui pourrait trinquer.
Je vais donc tâcher de vous expliquer pas à pas comment récupérer la taxe sur la valeur ajoutée quand une créance est devenue irrécouvrable, et ce, sans trop vous perdre dans les méandres des formalités fiscales.
TVA sur les débits ou sur les encaissements : attention à ne pas confondre
Avant d’aller plus loin et de parler de récupération de TVA, je vous propose déjà de faire le point pour vous assurer que vous êtes concerné par le sujet de cet article.
Si vous êtes sous le régime de la TVA sur les encaissements, vous ne pouvez pas être confronté à la problématique que j’aborde ici. Effectivement, vous ne reversez la taxe qu’à la date du paiement sur votre compte. Tant que la facture est impayée, vous n’avez rien à donner et vous n’avancez pas la TVA.
En revanche, si vous êtes sous le régime de la TVA sur les débits, vous pouvez être concerné par la récupération, car vous êtes tenu de reverser la taxe sur la valeur ajoutée dès l’émission de la facture, alors que dans bien des cas, le client ne vous paye pas avant plusieurs jours, voire plusieurs semaines. C’est donc là que les ennuis commencent si la facture est impayée.
À quel moment peut-on récupérer la TVA sur une facture impayée ?
La règle de base est assez simple : la TVA peut être récupérée uniquement lorsque la créance est définitivement irrécouvrable. Cela veut donc dire qu’il est impossible de procéder avant ce stade, et surtout pas quand il s’agit juste d’un client qui tarde à régler. En effet, une facture impayée n’est pas automatiquement une créance irrécouvrable.
Il faut donc avoir une preuve que le paiement ne pourra jamais avoir lieu. Ce n’est qu’à cette condition que votre entreprise pourra obtenir la restitution de la taxe versée à tort à l’administration fiscale. Soit il s’agit d’un débiteur en liquidation judiciaire, soit vous avez échoué à récupérer votre argent par toutes les tentatives de recouvrement possibles.
Que dit le Code général des impôts en cas de créances irrécouvrables ?
L’article 272 du Code général des impôts (ou CGI) encadre strictement la récupération de la TVA sur les créances devenues irrécouvrables. Comme nous l’avons vu précédemment, il dit en substance que vous pouvez imputer ou demander la restitution de la taxe uniquement si la créance est définitivement perdue, à condition de pouvoir le prouver.
Mais alors, comment procéder et quels types de preuves apporter ?
Concrètement, pour pouvoir prouver l’irrécouvrabilité réelle et objective, je ne peux que vous recommander de toujours avoir une traçabilité claire de vos relances, de vos mises en demeure et de toutes les tentatives de paiement dans lesquelles vous pourriez vous lancer. Plus votre dossier sera solide, plus vos chances de récupérer la TVA sans difficulté seront élevées.
Sachez cependant que si votre client est en procédure collective, vous avez une arme puissante entre vos mains, puisque lors d’un redressement judiciaire ou d’une liquidation judiciaire, vous pouvez obtenir un certificat d’irrécouvrabilité émis par le mandataire judiciaire ou le liquidateur.
Il va de soi que ce document fait foi et prouve que votre créance ne sera jamais récupérée (et que le montant de la facture est définitivement perdu). La voie est donc ouverte pour récupérer la TVA sur la somme facturée.
Bon à savoir : Dans les cas de sauvegarde ou de conciliation, ce certificat n’est pas délivré, car la créance n’est pas encore considérée comme irrecouvrable à ce stade.
Si votre client n’est pas en procédure judiciaire, vous pouvez aussi obtenir ce certificat en passant par une société de recouvrement. Celle-ci devra prouver qu’elle a tout tenté, sans succès. Ne le prenez pas à la légère, parce que ce document peut vous être demandé en cas de contrôle fiscal.
Comment procéder après obtention du certificat d’irrécouvrabilité ?
Dès lors que vous avez entre les mains le fameux certificat d’irrécouvrabilité (ou tout autre justificatif valable), vous pouvez passer à l’action. Pour cela, il vous suffit de déclarer la TVA récupérable via la ligne 21 de la déclaration CA3 « Autre TVA à déduire ».
Selon votre situation, vous avez aussi la possibilité de faire une demande de remboursement auprès du service des impôts des entreprises (SIE) compétent.
Mais attention, les délais sont limités. En effet, vous avez jusqu’au 31 décembre de la deuxième année qui suit la date à laquelle l’événement qui a rendu la créance irrécouvrable est survenu. Au-delà, c’est trop tard, la TVA reversée sera définitivement perdue. Et il n’y a aucune exception.
Vous l’aurez compris, la TVA qui concerne les factures impayées est un sujet épineux. Toutefois, vous n’êtes pas sans recours. Assurez-vous de conserver tous les écrits qui vous permettront de constituer un dossier solide et agissez dans les délais. Si vous suivez ces deux conseils très simples, vous pourrez sans problème récupérer la taxe sur vos créances irrécouvrables. Et petit conseil au passage, pour éviter d’en arriver là, pensez à l’affacturage !
