Quand on dirige une entreprise, on se retrouve très rapidement noyé sous des obligations fiscales, sociales et comptables en tout genre. Et comme beaucoup d’entrepreneurs, il est tentant de confier sa comptabilité à un expert, d’autant plus que ce dernier sécurise les comptes et les déclarations. Mais il y a une question que l’on ne se pose peut-être pas assez souvent : que se passe-t-il si l’expert-comptable commet une erreur ? Est-ce qu’il est responsable devant la loi ? Peut-on obtenir réparation ? Et surtout, comment réagir en cas de faute du cabinet comptable qui entraîne un redressement fiscal ou des sanctions de l’URSSAF ? Si je vous en parle, c’est parce qu’une amie entrepreneuse a récemment été dans ce cas de figure. On fait le point.
La responsabilité de l’expert-comptable est un principe contractuel
La responsabilité des experts-comptables s’inscrit dans le cadre juridique même de leur profession. En signant une lettre de mission avec un cabinet, vous établissez automatiquement un contrat qui engage le professionnel. Or, c’est celui-ci qui encadre tout particulièrement la responsabilité du comptable en cas d’erreur de comptabilité et de déclaration fiscale ou sociale.
Mais attention, son obligation reste une obligation de moyens et non une obligation de résultat. En d’autres termes, le client de l’expert-comptable doit pouvoir démontrer trois éléments :
- la faute de l’expert ;
- le préjudice subi ;
- le lien direct entre les deux.
À ce propos, la jurisprudence est plutôt claire. Si l’erreur du professionnel conduit à un redressement ou à des pénalités fiscales, il peut tout à fait être jugé responsable et même être condamné. Encore faut-il pouvoir prouver la négligence dans le travail ou le manque de conseil.
Le cadre de la faute et de l’obligation de conseil du comptable
Une chose est certaine, la faute potentielle d’un cabinet comptable ne se limite à une simple erreur de chiffres. Au contraire, celle-ci concerne aussi leur devoir de conseil qui est permanent.
Concrètement, un expert-comptable doit alerter son client sur les risques fiscaux, il doit aussi rappeler les obligations sociales et fournir des informations fiables pour la gestion de l’entreprise. Ainsi, si votre expert ne vous avertit pas d’un avantage fiscal perdu ou d’un risque de redressement URSSAF, il engage aussi sa responsabilité professionnelle.
Vous comprenez donc bien que l’expertise ne tient pas aux comptes annuels ou à la conformité des déclarations. C’est avant tout une mission globale de conseil qui pèse sur l’expert-comptable tout au long de son exercice.
Il en va d’ailleurs de même pour les missions sociales, tout aussi sensibles. Un expert chargé des bulletins de paie, des contrats de travail ou des déclarations sociales doit respecter le droit du travail et la réglementation en vigueur, ce qui implique qu’il soit, là aussi, irréprochable. Si des erreurs apparaissent, une fois de plus, l’entreprise peut se défausser et remettre la responsabilité sur le cabinet comptable. Et de ce que j’ai pu en voir d’après mes recherches, la jurisprudence a déjà condamné de nombreux experts-comptables pour des contrats de travail erronés ou des cotisations sociales mal calculées.

L’assurance responsabilité civile professionnelle
Comme toute profession réglementée, les experts-comptables sont obligés de souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle. Or, cette assurance couvre justement les préjudices subis par les clients en cas de faute du cabinet. C’est donc un garde-fou essentiel, puisqu’un simple oubli dans une déclaration peut coûter des milliers d’euros à une entreprise. Ainsi, en pratique, si votre expert est reconnu responsable d’une erreur, c’est son assurance qui indemnise le préjudice.
Pour autant, il reste indispensable pour vous, entrepreneur, de conserver toutes les preuves (lettres de mission, échanges d’emails, documents comptables, etc.), car toutes les informations qu’elles contiennent sont indispensables pour démontrer la faute et obtenir réparation. Si la profession est bien encadrée, le client doit rester un minimum vigilant sur le suivi de la mission.
Quels sont les recours en cas de faute de l’expert-comptable ?
Si vous êtes victime d’une erreur comptable, plusieurs recours existent.
La première étape consiste à trouver une solution amiable. Demandez des explications au cabinet ou sollicitez un dédommagement via l’assurance professionnelle.
Si vos tentatives échouent, c’est là que vous pouvez saisir la cour compétente pour engager la responsabilité civile de l’expert, en sachant que dans les cas les plus graves, une faute lourde peut entraîner des sanctions disciplinaires par l’ordre des experts-comptables.
Le plus important est de ne jamais rester passif face à un préjudice. Toute erreur comptable, qu’elle soit fiscale ou sociale, doit être contestée. Vous avez le droit d’obtenir réparation si la faute est avérée et que votre entreprise a subi un dommage financier réel. Croyez-moi, les tribunaux considèrent ces affaires avec sérieux, car les conséquences pour le client peuvent être lourdes.
Comment limiter les risques pour votre entreprise ?
Bien que l’intérêt de confier sa comptabilité à un expert-comptable soit de ne plus s’en préoccuper, il est dangereux de complètement déléguer sans assurer aucun contrôle. Même avec un expert de confiance, je vous conseille vivement de rester attentif à son travail et de régulièrement lui poser des questions ou lui demander des conseils précis.
Et surtout, vérifiez bien que la lettre de mission couvre toutes les missions que vous confiez à votre expert. Assurez-vous que le cabinet que vous avez choisi dispose d’une assurance obligatoire. Enfin, gardez une trace écrite de chaque conseil donné par le professionnel. Ne vous contentez jamais d’un échange oral, car vous ne pourrez pas prouver la teneur de ce qu’il vous a dit. C’est l’unique moyen de vous protéger en cas de litige.
En bref, oui, la responsabilité de l’expert-comptable en cas d’erreurs peut tout à fait être engagée. Mais cela ne veut pas dire que vous pouvez entièrement vous décharger sur lui. Pour vous, entrepreneurs, l’enjeu est simple : vous devez vous montrer vigilant dans le contrôle du travail de l’expert-comptable et ne jamais laisser planer le moindre doute.